Travailler à domicile : comment allons-nous signer des documents maintenant ?
Pour ceux d'entre vous qui sont amenés à signer régulièrement des documents, le travail à domicile ne signifie pas la mort du contrat signé. Cependant, vous devez bien réfléchir à la solution que vous utilisez pour signer électroniquement : toutes les signatures électroniques ne sont pas égales aux yeux de la loi.
Au sein de l'Union européenne, un Règlement opère une distinction entre trois types de signatures électroniques :
- les "signatures électroniques" simples (appelées "SES" - par exemple, la signature moyenne d'un courriel, une photo ou un scan de votre signature manuscrite que vous joignez à un PDF, etc ;)
- les "signatures électroniques avancées" ("AES" - une AES est une SES comportant un certain nombre de garanties supplémentaires concernant l'identification du signataire et l'immuabilité du contenu signé, et celle que la plupart des gens utilisent en permanence est le jeton généré sur leur lecteur de carte bancaire lors de la signature de transactions bancaires) ;
- les "signatures électroniques qualifiées" ("QES" - il s'agit d'une AES offrant encore plus de garanties, comme l'intervention d'un tiers de confiance, une autorité de certification, pour renforcer le lien entre la signature et une personne physique).
En vertu de ces règles européennes, une QES a automatiquement le même effet juridique qu'une signature manuscrite. C'est donc un excellent moyen de signer des contrats si les signataires disposent tous d'une QES.
Un certain nombre de pays de l'UE disposent de leurs propres méthodes de QES parrainées par l'État (par exemple, la Belgique dispose de la méthode de signature de l'eID, mais aussi d'itsme et même du LawyerID dont disposent vos avocats ; les autres pays disposant de méthodes de QES nationales officielles sont notamment l'Autriche, l'Estonie, la Finlande, l'Allemagne, le Luxembourg, le Portugal, l'Espagne, ...). Cependant, cela laisse encore de grandes lacunes, de nombreux pays de l'UE ne disposant pas de méthode QES locale (par exemple, la France, le Royaume-Uni), et encore plus de pays dans le monde. Par conséquent, tous les signataires ne disposeront pas toujours d'une QES. En d'autres termes, pour de nombreux documents ou contrats, vous ne pouvez pas vous fier uniquement aux méthodes de QES.
Dans ce contexte, que devez-vous faire ?
our les contrats entièrement nouveaux, la "meilleure" solution est soit l'encre humide (c'est-à-dire une signature manuscrite, sur papier), soit une QES, lorsqu'elle existe. Signez-vous avec une personne qui ne dispose pas d'une méthode de QES ? Essayez de trouver un moyen de vous donner mutuellement des garanties supplémentaires pour créer la confiance, afin de vous aider à répondre à ces deux questions clés :
- Comment savez-vous (avec un degré raisonnable de certitude) que le signataire envisagé est bien la personne qui a signé ?
- Pouvez-vous prouver que le contenu du document est resté inchangé après la signature ?
Parmi les exemples de ces mesures figurent l'identification approfondie des clients, le partage des scanners des documents signés et l'envoi d'un original signé à l'autre par courrier ou par messagerie. Ces mesures ne seront pas aussi simples qu'une QES, mais elles pourraient contribuer à limiter vos risques juridiques.
Si vous avez déjà un contrat-cadre existant, vérifiez s'il comporte un mécanisme qui vous permet d'apporter des modifications ou de passer des commandes sans signature manuscrite. Il se peut, par exemple, que votre contrat-cadre vous permette, à vous et à votre partie contractante, de convenir de modifications par simple échange de courriels. S'il ne prévoit rien, suivez les recommandations ci-dessus concernant les nouveaux contrats.
Et si tout cela semble trop complexe? Sauf dans des situations spécifiques (par exemple, les accords af-fectant la propriété de biens immobiliers, les contrats de travail, etc.), aucune règle ne vous empêche d'intégrer une signature scannée dans un PDF du contrat, ou même de confirmer dans une chaîne de courriels que les deux parties sont d'accord. Sachez toutefois que l'applicabilité de cet accord pourrait être remise en question et qu’il vous sera peut-être nécessaire d’utiliser divers moyens de preuve pour prouver que l'autre partie a effectivement signé l'accord (qui l'a signé, mais aussi ce qui a été signé exactement).
En d'autres termes, c’est au final une question de confiance. Si vous faites déjà confiance à l'autre signa-taire, un simple échange de courriers électroniques ou un scan de signature intégré au format PDF peut suffire - mais pour les contrats stratégiques ou importants, obtenez une confirmation par une signature plus facilement opposable (ou assurez-vous que lorsque vous vous rencontrez à nouveau en face à face après une période de confinement due au coronavirus, vous échangez une version papier). Sinon, essayez de prendre quelques précautions supplémentaires - après tout, la précaution est le maître mot des semaines qui viennent.